Un fait inédit.

UN FAIT INÉDIT

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A LA SUITE D’UNE ERREUR HUMAINE

DES MOBILISABLES SONT APPELÉS

EN PLEINE NUIT.

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NOUS SOMMES QUELQUES ANNÉES AVANT LA DÉCLARATION DE LA GUERRE

A LA FRANCE PAR L’ALLEMAGNE, EN AOÛT 1914.

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Ci-dessus : reproduction de l’ordre de mobilisation général d’août 1914.

Où il est écrit :

« Par décret du Président de la République, la mobilisation des Armées de terre et de mer est ordonnée, ainsi que la réquisition des animaux, voitures et harnais nécessaires au complément de ces Armées ».

« Le premier jour de la mobilisation est le dimanche deux août 1914 ».

« Tout Français soumis aux obligations doit, sous peine d’être puni avec toute la rigueur des lois, obéir aux prescriptions du Fascicule de mobilisation (pages coloriées placées dans son livret) ».

« Sont visés par le présent ordre tous les hommes non présents sous les drapeaux et appartenant » :

« 1e à l’Armée de terre y compris les troupes coloniales et les hommes des services auxiliaires ».

" 2e à l’Armée de mer y compris les inscrits maritimes et les armuriers de la marine, etc ».

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Ci-dessus : Paris, à la gare de l’Est, c’est la bousculade lors de la mobilisation.

Un service d’ordre interdit l’entrée dans la cour, seuls les partants peuvent y pénétrer.

A la suite d’un incident survenu la nuit, qui est dû à l’erreur d’un brigadier de gendarmerie.

Le bruit court et s’est rapidement propagé, annonçant que la mobilisation générale est ordonnée dans l’Est de la France.

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Un gendarme a ouvert un pli officiel à la place d’un autre.

Cette erreur va plonger la population résidante à proximité de la frontière Allemande, dans un état de panique, croyant à une invasion.

A la suite de cette confusion, la mobilisation débute en pleine nuit, vers minuit.

A une heure du matin, les soldats alertés, se rendent à leurs postes, notamment sur les ouvrages d’art de la voie ferrée.

Le personnel du chemin de fer, des postes et des télégraphes sont également réquisitionnés.

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Ci-dessus : la garde-champêtre.

Des patrouilles de gendarmes et des douanes se déplacent aux endroits désignés dans le manifeste de mobilisation.

L’ordre concerne tous les réservistes, notamment ceux du canton proche de la frontière qui regroupe neuf communes.

Le tocsin résonne dans tous les villages, les hommes mobilisables sont réveillés au son du tambour, par les soins des Maires ou des gardes-champêtres.

Immédiatement, tout le monde se met en marche. Avant le lever du jour, les réservistes arrivent à Nancy, d’autres se rendent à Lunéville…

Dans les villes, on est stupéfait de voir arriver, tout ce monde.

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Dès l’erreur reconnue, certains sont stoppés en cours de route.

Cette confusion se répercute jusqu’à Bar-le-Duc avec l’arrivée dans de nombreux trains, des centaines de réservistes.

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Ci-dessus : A Bar-le-Duc, la façade principale de la gare de chemin de fer.

L’enquête sur les causes de cette mobilisation :

- Permet d’établir la responsabilité du brigadier de gendarmerie. Il est rapidement mis en état d’arrestation.

Il proteste et déclare :

- Que la dépêche qu’il a reçue « était explicite et formelle ».

D’après les renseignements recueillis :

- Le gendarme reçoit un télégramme concernant une mobilisation partielle,

- Or, par erreur, il ouvre le pli qu’il détient, et qu’il doit seulement, décacheter en cas de mobilisation.

- Immédiatement, il se conforme aux instructions contenues dans celui-ci, la mobilisation générale est rendue publique.

En réalité :

Tous les ans à cette époque, l’autorité militaire, fait procéder à un exercice de mobilisation qui a pour but de permettre à l’Etat-major de se rendre compte de l’état physique des jeunes soldats.

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Ce témoignage :

« Cette nuit, la gendarmerie d’une commune de Lorraine recevait une dépêche relative à la mobilisation, mal transcrite ou mal interprétée ».

« Toujours est-il qu’au reçu du télégramme, le brigadier chef de poste courut chez le Maire, en pleine nuit, au son du tambour, il alerte la population, qu’un ordre de mobilisation générale venait d’être décrété ».

« Que tous les hommes disponibles de vingt à quarante cinq ans, ainsi que les territoriaux, devaient rejoindre sur le champ, leurs corps respectifs ».

« Puis sans perdre de temps, les gendarmes de la brigade, fusil dans le dos, sautent sur leurs chevaux et vont porter le même ordre de mobilisation dans tous les villages… ».

« Partout retentit les battements du tambour municipal quand ce n’est pas le tocsin qui résonne ».

« A deux heures du matin, les premiers mobilisés, leur baluchon à l’épaule, traverse les communes et se dirigent vers Lunéville, Nancy, Toul, etc. ».

« Mais ils s’étonnent. Sur tout le parcours, c’est le calme, ils ne rencontrent que peu de personnes ».

« Ils sont inquiets ».

« Dans une commune traversée, l’un d’eux, sonne chez le Maire. Par contre lui, ne songe guère à la mobilisation quand retentit le timbre de la sonnette. Il ronfle à poings fermés ».

« Réveillé en sursaut, d’une voie entrecoupée, il murmure » :

« Mais je ne sais rien, je n’ai rien vu, ni reçu ».

« Sur l’affirmation de mon interlocuteur, qu’il ne s’agissait pas d’une mauvaise farce, je lui demandais de se rendre à la poste où le télégramme avait dû passer ».

« Le receveur lui confirma qu’il en avait reçu un mais quant au reste, il était, dit-il, tenu au secret ».

« Je rassurais ces braves gens en leur disant qu’il ne s’agissait, certainement, que d’un essai de mobilisation, etc. ».

« Et pourtant, des mobilisés passaient devant nous. Ils chantaient en sourdine, encore tout impressionnés par les scènes rapides et déchirantes d’adieu à leurs familles ».

« A six heures du matin, la nouvelle nous parvient qu’il y avait une erreur d’interprétation ».

« Malgré la tension, la fatigue » :

« En chantant à gorge déployée, nous eûmes tôt fait de regagner nos familles ».

La population se souviendra longtemps de cette nuit d’hiver. Bien des mères et des épouses y ont vécu des heures, d’autant plus angoissantes, que le son du tambour avait, comme la foudre, surpris en pleine nuit les villageois.

La morale de l’histoire :

D’un côté, explique-t-on :

- L’incident est très désagréable.

Supposons :

- Qu’un jour de mobilisation générale, des fonctionnaires responsables, au lieu de transmettre le pli concerné, en transmettent un autre.

Les conséquences seraient terribles, comme on peut l’imaginer.

Dans cette affaire, il y a aussi le côté positif :

Toute la presse se félicite de cette erreur : « A quelque chose, malheur est bon ! ».

« Depuis 1871, aucun exercice de ce genre n’avait été effectué, que celui-ci avait permis de constater que tout le monde avait répondu à l’appel ».

Dans certaines communes :

On a comptabilisé plus de mobilisés que de réservistes.

Il y avait des garçons trop jeunes, des laboureurs trop vieux, qui se présentèrent à la porte de la caserne, armés de fusils et de cartouches provenant des sociétés de tirs.

Malgré les antimilitaristes, les meetings, et les réunions, des pacifiques prêchent la bonne parole.

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Ci-dessus : les antimilitaristes.

Dès que l’on parle de mobilisation, des braves et vaillants défenseurs de la Patrie, en grand nombre à l’appel du clairon, se précipitent aux portes des casernes.

Cela se vérifiera un peu plus tard, lors de la véritable mobilisation en août 1914.

Un épilogue heureux de cet incident :

Une heureuse nouvelle est parvenue aux réservistes qui avaient été convoqués officiellement pour une période de dix sept à vingt trois jours :

- Après quatre jours de présence sous les drapeaux, le Ministre de la guerre a mis fin à leur période.

 

 

Christian BOULAY

Illustrations de l’auteur.

 

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